Le PLF 2023 a été présenté. Ce mémo donne un tour d’horizon de ce qu’il contient. Sans surprise, la (mauvaise) stratégie gouvernementale est maintenue… pour le plus grand plaisir du patronat.
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Les principales mesures du PLF 2023
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Sur l’environnement
59.6 Mds d’€ sont prévus, répartis entre le ministère de la transition écologique – qui récupère la mission « relations avec les collectivités territoriales » (40.3Mds€) et celui de l’énergie (19Mds€). Pour ce dernier, une part importante des crédits est consacrée au « bouclier tarifaire » (12 Mds€) sur un coût total estimé de 45 Mds€ en 2023. Ce bouclier n’empêchera pas les factures de bondir de 15% en 2023.
Le reste concerne principalement la rénovation thermique, la mobilité dite « durable », la biodiversité.
De manière générale, derrière les montants qui sont globalement en progression, l’empilement des dispositifs et l’absence de stratégie globale de rupture environnementale saute aux yeux. Sans pôle public de l’énergie, sans reprise en main du temps long, nous sommes condamnés à aller d’urgence en urgence.
Sur le travail
6.7 Mds€ supplémentaires sont débloqués pour le ministère du travail. Pour l’essentiel, les mesures concernent l’alternance, l’apprentissage, la mise en place de « France Travail » et la dotation de « France Compétences ».
Autres crédits importants :
- 3.6 Mds€ pour l’enseignement scolaire, essentiellement liés aux hausses (insuffisantes) des salaires des enseignants.
- 3 Mds€ supplémentaires pour les armées, qui devient le second poste le plus important après l’enseignement scolaire.
- 1 Mds€ pour l’intérieur, essentiellement pour de nouveaux recrutements et un renforcement des forces mobiles (le gouvernement se prépare sans doute à de fortes mobilisations sociales)
Sur l’emploi : 7 sur 10 dans l’intérieur, la justice ou les armées
- Les 10 000 créations de postes sont réparties comme suit :
- Un tiers pour l’intérieur (3109)
- 2313 pour la justice
- 2000 pour l’éducation nationale ; en réalité +4000 AESH et – 2000 pour les autres personnels[1]
- +1583 pour les armées
- + 1000 pour le ministère du travail ; le journal Le Monde indique que Pôle Emploi conserve un renfort d’effectif avec 969 EQTP pour « recenser les chômeurs susceptibles de travailler dans les métiers en tension ». On a la confirmation claire de la vision gouvernementale en matière d’emploi ; « traquer » les chômeurs jugés réticents à travailler et donc responsables de leur situation. Au même moment, une enquête du Ministère du Travail révèle que le non-recours à l’assurance chômage pourrait concerner un chômeur sur 4[2]
L’emploi au ministère de l’environnement reste stable… mais la saignée chez les opérateurs publics depuis 10 ans est nette :
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Financement et fiscalité : la fuite en avant continue
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- Sans surprise, le Ministre de l’Economie a affiché son refus d’augmenter les impôts (des plus aisés ou du capital). Pas de taxe sur les superprofits, pas de mise à contribution des plus fortunés qui voient leur patrimoine augmenter, pas d’impôt sur les héritages (E. Macron a même promis leur diminution, accentuant la lutte pour sa classe).
- Le véritable premier poste de dépense, ce sont les aides publiques aux entreprises qui s’élèvent à au moins 150 Mds€ par an, soit l’équivalent de plus de 30% du budget de l’Etat ou deux fois le budget de l’éducation nationale. La fuite en avant continue avec la suppression annoncée de la Contribution sur la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE), un nouveau cadeau fiscal de 8Mds€ (montée en charge progressive, avec d’abord une réduction de 4Mds€). La mise en faillite de nos services publics et protection sociale continue pour assurer le capital.
- On notera une indexation du barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation ; en relevant les tranches d’imposition, l’impôt payé par les ménages ne devrait globalement pas augmenter. Cela ne remplace en rien les nécessaires augmentations de salaires.
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Un projet sans vision cohérente
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De manière générale, le décalage entre les projections gouvernementales et la réalité telle qu’elle se dessine est saisissant. On notera :
- Le risque majeur de récession et de destruction d’emplois industriels, du fait de la hausse des taux d’intérêts d’un côté, et de l’explosion des prix de l’énergie de l’autre.
- L’inflation qui continue à être très élevée, ce qui rend déjà caduques la plupart des concessions offertes aux salarié-e-s du public et du privé (le « dégel » du point d’indice ne comble absolument les pertes de pouvoir d’achat liées à l’inflation).[1]
- Les besoins sont criants, et ni les dispositifs, ni les budgets ne sont à la hauteur. On se demande toujours à quoi sert le Commissariat au Plan, et on ne trouvera pas de stratégie énergétique cohérente au-delà de quelques mesures de saupoudrage.
En somme, c’est un budget trop faible, trop peu ambitieux, et sans réelle vision qui nous est présenté. Il s’inscrit dans la droite ligne des budgets précédents ; réductions d’impôts pour le capital, pression accrue sur le travail, saupoudrage et empilement de mesures désarticulées. Cette stratégie est vouée à l’échec, et si la situation économique empire, nous risquons d’avoir de nombreux autres budgets rectificatifs à commenter. La crise que nous traversons est structurelle ; le gouvernement mise sur un nouveau « quoi qu’il en coûte » pour laisser passer la vague et revenir le plus rapidement possible au statu quo. Or du statu quo, le monde du travail ne veut plus entendre parler. Le rapport de force ne peut que s’intensifier dans les mois à venir.
[1] https://analyses-propositions.cgt.fr/memo-eco-oui-les-revenus-diminuent-en-france
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LES ANNEXES
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ANNEXE 1
ANNEXE 2
ANNEXE 3