Depuis plusieurs mois de bataille contre la réforme des retraites, de nombreux arguments ont été avancés pour s’opposer à cette réforme antisociale. C’est notamment le cas de la notion de SAS de précarité dans lequel se retrouve beaucoup trop de travailleurs.es entre 55 et 69 ans. En effet, en 2021, et selon les données produites pas l’Institut National de la Statistique Economique (INSEE), un. e travailleur.se sur six ne serait ni en emploi ni en retraite (NER) sur cette tranche d’âge.
S’il fallait donc un argument supplémentaire le voici : à 60 %, ce sont 28 % des travailleur∙ses qui ne sont ni en emploi ni en retraite. Le report de l’âge légal d’ouverture des droits entraînera alors soit une augmentation de cette proportion, soit une augmentation de la durée passée dans cette situation. Pour le gouvernement, il serait donc préférable de laisser les personnes en situation de précarité plutôt que de leur permettre d’accéder à une retraite bien méritée.
Ce nouveau mémo Sécu est l’occasion de revenir sur cette notion de SAS de précarité et de montrer que la situation des séniors dans le rapport salarial est aujourd’hui bien trop souvent précaire, avec peu de perspectives de retour à l’emploi. Un report de l’âge d’ouverture des droits n’aura que pour conséquence de les maintenir dans ces situations de précarité.
Les points importants à retenir |
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- Qu’est-ce que le Sas de précarité, et que sont les NER ?
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Le Sas de précarité correspond à une période de précarité avant la retraite, c’est-à-dire une situation où les travailleur∙ses ne sont ni en emploi ni en retraite (NER). Il s’agit donc des personnes qui sont soit inactives et sans revenu soit au chômage. Concrètement, les périodes de précarité en fin de carrière sont plus importantes pour les ouvrier∙es et les employé∙es que pour les cadres et les professions intermédiaires.
Trop souvent, ces travailleur∙ses privé∙es d’emploi se retrouvent au chômage de longue durée, puis aux minimas sociaux et sortent même du champ des « demandeur∙ses d’emplois ».
Bien sûr, pour différentes raisons, certaines et certains peuvent choisir d’interrompre leur recherche d’emploi et d’attendre l’ouverture de leurs droits. Mais il s’agit d’une quantité négligeable. Dans l’ensemble, il s’agit bien de travailleur∙ses qui subissent cette situation.
- La part des séniors dans la catégorie NER augmente entre 55 et 60 ans
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Qu’en est-il des chiffres maintenant ? Les données misent à disposition par l’INSEE couvrant l’année 2021. Elles permettent de mettre en évidence que la catégorie des NER à tendance à croître à partir de 55 ans pour atteindre un pic à 60 ans.
Graphique 1 : Situation des travailleur∙ses séniors dans le rapport salarial entre 55 et 69 ans en 2021
Entre 59 et 61 ans plus de 20 % des travailleur∙ses sont inactif∙ves. A 60 ans, si l’on additionne la catégorie inactif∙ves et chômage, ce qui correspond à la catégorie NER et au SAS de précarité, c’est 28,2 % des travailleurs.es de 60 ans qui sont privés d’emploi et 27,9 % des travailleur∙ses de 61 ans.
Parmi les travailleur∙ses de 55 à 69 ans NER, 17 % sont au chômage au sens du BIT, 39 % sont inactif∙ves pour raison de santé ou de handicap et 44 % le sont pour une autre raison. La situation des NER est le plus souvent subit puisqu’entre 55 et 61 ans, 64 % d’entre eux ont soit des problèmes de santé soit sont au chômage.
Un autre fait intéressant qu’il faut noter, c’est l’augmentation entre 2014 et 2021 du pourcentage de travailleur∙ses dans la catégorie sans emploi ni retraite. En effet, à 61 ans, le pourcentage de NER a augmenté de 11 % sur la période quand le nombre de retraité∙es à 61 ans a baissé de plus de 26 % sur la même période.
- En France, trois séniors NER sur cinq sont des femmes
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En France, parmi les personnes de 55 à 69 ans ni en emploi ni à la retraite, 61 % sont des femmes. Toujours selon l’INSEE, à 61 ans, 33 % des femmes sont NER contre 22 % des hommes. Après 62 ans, les personnes NER sont deux fois plus souvent des femmes. Une explication possible tient à la plus grande complexité pour les femmes d’atteindre une carrière complète.
Concrètement, le report de l’âge légal de départ à la retraite devrait impacter directement l’ensemble de ses travailleur∙ses qui ne sont ni en emploi ni en retraite et qui pour l’écrasante majorité ne l’ont pas choisi.
Plutôt que d’enfoncer les travailleur∙ses dans un SAS de précarité, c’est le retour à un retraite à 60 ans dont nous avons collectivement besoin.