Le retour des riches ne stimule pas l’investissement

Publié le 4 nov. 2020
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mémo éco
 Cet article a été publié dans la Lettre éco d'octobre 2020. Attractivité, compétitivité, baisse de la fiscalité… Les gouvernements des économies avancées justifient ces mesures sur la base de la stimulation de l’investissement. Problème ? Il n’y a aucun lien entre les deux. Que font les riches de leur argent ? La baisse des impôts de production, la « flat tax », la suppression de l’ISF ; les moyens mis en œuvre pour tenter de faire revenir nos « super-riches » sont importants...

 Cet article a été publié dans la Lettre éco d'octobre 2020.

Attractivité, compétitivité, baisse de la fiscalité… Les gouvernements des économies avancées justifient ces mesures sur la base de la stimulation de l’investissement. Problème ? Il n’y a aucun lien entre les deux.

Que font les riches de leur argent ?

La baisse des impôts de production, la « flat tax », la suppression de l’ISF ; les moyens mis en œuvre pour tenter de faire revenir nos « super-riches » sont importants. Ils sont aussi vains, et ce qu’ils réussissent ou non à attirer les grandes fortunes.

Une étude de Princeton citée par Anne Laure Delatte[1] rappelle deux constats, l’un bien connu, l’autre sans doute moins.

Le premier, c’est l’hyper concentration de l’épargne chez les plus riches depuis les années 1980, résultat direct de la financiarisation de l’économie et de l’explosion des inégalités. Il n’est d’ailleurs pas étonnant, comme nous l’écrivons dans cette lettre, que la moitié de l’épargne constituée pendant la crise du Covid est le fait des 10% les plus riches du pays (que Bruno Le Maire refuse de taxer au nom de… la relance. Comprendra qui pourra alors que les plus riches sont aussi ceux qui ont la propension à consommer la plus faible).

Mais le deuxième point, sans doute le plus important, porte un coup fatal aux défenseurs des politiques gouvernementales. Les auteurs de l’étude expliquent clairement, nombreuses données à l’appui, que dans le cas américain l’argent des riches ne sert pas à financer de l’investissement productif (machines, brevets, recherche etc.). Où vient-il se déverser ? Et bien il vient financer l’endettement des ménages plus pauvres (crédits à la consommation, immobilier) et vient financer l’endettement public !

 

[1] Mian A.R, Straub, L., Sufi A., « The saving glut of the rich and the rise in household debt », NBER, 2020, in Anne-Laure Delatte, « L’Epargne des très riches », Libération, 12 octobre 2020

Comprendre l’absurdité de ce mécanisme économique

Il faut bien mesurer ce que cela veut dire. Les 1% les plus riches voient leur épargne gonfler. Mais ils ne les prêtent pas directement aux ménages et aux Etats. Ils passent par des sociétés de gestion, qui elles-mêmes passent par les banques et les grandes firmes multinationales. Et que font ci les banques, là les grandes firmes ? Et bien elles prêtent aux ménages… et aux Etats ! La folle boucle économique de la financiarisation est bouclée.

Notre organisation économique peut donc être résumé ainsi : le patrimoine des riches gonfle, l’endettement des plus pauvres augmente, et l’endettement de l’Etat également. Mesure-t-on suffisamment l’absurdité de cette logique, et les logiques de classes qu’elles révèlent ?

La stupidité de la course aux riches

Faire revenir les riches par la baisse de la fiscalité du capital ne conduit donc qu’à une chose : augmenter le patrimoine des riches, sans lien avec l’investissement. Dans le même temps, les revenus des plus pauvres fondent comme neige au soleil, et l’endettement de l’Etat continue d’augmenter tandis que ses recettes fiscales diminuent pour soutenir un modèle économique qui en plus d’être fondamentalement injuste, est totalement non viable. Il y a urgence à suivre la conclusion des auteurs de l’étude : taxer massivement le capital.

 

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