Mémo Sécu n°15 : L'ONDAM

Publié le 7 nov. 2023
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Instauré par l’ordonnance du 24 avril 1996, l’Objectif National de Dépenses d’Assurance Maladie (ONDAM) est l’outil principal de pilotage des dépenses d’assurance maladie en France. Concrètement, il s’agit du montant maximal d’augmentation des dépenses, en milliards d’euros, fixé pour l’année à venir, pour l’ensemble des dépenses de santé financées par l’assurance maladie (remboursements, financement de l’hôpital, etc.). Ce montant est donné par un taux d’augmentation à ne pas dépasser, par rapport à l’année précédente.

Défini chaque année dans le cadre de la Loi de Financement de Sécurité sociale (LFSS), ce dispositif de contrôle des dépenses permet de mettre en œuvre le principe de la contrainte budgétaire et l’austérité en matière de santé. Avec l’ONDAM, il ne s’agit plus d’abord de répondre aux besoins des travailleurs.ses et après de se poser la question des recettes, comme à la création de la Sécurité sociale, mais bien de gérer les dépenses à partir d’une contrainte budgétaire défini a priori. Les moyens avant les besoins !

Les points importants à retenir

  • L’ONDAM est un outil de contrôle des dépenses basé sur le principe d’une enveloppe de dépense dite fermée : les moyens avant les besoins.
  • L’ONDAM est un outil politique de contrôle par l’Etat de l’offre de santé.
  • En 2023, pour la première fois, l’ONDAM sera inférieur à l’inflation. Les dépenses d’assurance maladie vont donc baisser.
L’ONDAM : limiter les dépenses pour mieux les contrôler 

L’ONDAM est devenu aujourd’hui un outil incontournable dans le pilotage financier des dépenses de santé. Il a été créé pour limiter les dépenses de santé financées par la Sécurité sociale car il s’agit des dépenses qui augmentent le plus vite et qui étaient jugées alors responsables par le gouvernement du déficit, le fameux « trou » de la Sécurité sociale. Rappelons immédiatement que le déficit de la Sécurité sociale est avant tout un problème de recettes et non de dépenses. Autrement dit, avec l’ONDAM, le gouvernement affiche l’ampleur de la maitrise des dépenses de santé qu’il souhaite atteindre.

Si de 1997 à 2009 l’ONDAM n’a pas été respecté dans la mesure où l’évolution effective des dépenses a été supérieure à celle prévue en LFSS, depuis 2010 il est strictement respecté (hormis pour la crise sanitaire du COVID).

De 1997 à 2002, l’ONDAM est une contrainte relativement souple dans la mesure où les dépenses de santé progressent dans le périmètre de l’ONDAM à hauteur de 5 à 7,3% soit au moins deux fois plus vite que les évolutions décidées dans les LFSS. Autrement dit, l’ONDAM est une contrainte sur le papier mais pas dans les faits.

De 2003 à 2010, l’évolution des dépenses de santé est de moins en moins rapide passant d’une augmentation de 6.9% en 2003 à une augmentation autour de 3% en 2010, dépassant légèrement les augmentations prévues de l’ONDAM.

Entre 2010 et 2019, l’ONDAM s’est stabilisé autour de 3% étant entendu que les dépenses ont été systématiquement inférieures aux prévisions (voir graphique ci-dessous).

Concrètement, la logique est à la baisse continuelle du taux d’augmentation de l’ONDAM. En plus, cet ONDAM est toujours inférieur aux besoins qui permettrait juste de maintenir le service à un niveau équivalent chaque année. En somme, l’ONDAM empêche à la fois de répondre au nouveau besoin et à la fois oblige chaque année à baisser la réponse aux besoins.  

Entre 2020 et 2022, les très fortes hausses des dépenses de santé, largement supérieures aux évolutions de l’ONDAM prévues, sont liées principalement à la crise sanitaire et aux mesures du « Ségur de la santé ». Enfin, 2023 est la première année où l’ONDAM est inférieur à l’inflation. Il ne s’agit donc non pas de ne pas faire augmenter suffisamment les dépenses mais bien de compresser celles-ci. Concrètement, en 2023, le gouvernement propose de baisser les dépenses d’assurance maladie.

L’ONDAM, un outil politique 

En affichant ce que doivent être le montant et l’évolution des dépenses de santé pour l’année à venir l’ONDAM permet de construire l’histoire selon laquelle il y aurait une évolution soutenable, c’est-à-dire compatible avec la croissance économique du pays, et une augmentation des dépenses de santé qui n’aurait pas lieu d’être car tout simplement impossible à financer ou de manière plus technique car liée à des dépenses dites de surconsommation des soins, aux abus, etc. L’ONDAM traduit une conception politique où la réponse aux besoins sociaux, ici de santé, est explicitement soumise à la contrainte économique telle que décidée par le gouvernement.

Il donne à la Sécurité sociale un objectif à respecter. Il oblige la Sécurité sociale à trouver toujours plus le moyen de faire plus avec moins.  Il permet enfin au gouvernement de justifier toutes les réformes du système de santé qui permettent de faire des économies y compris au détriment de la prise en charge, de la qualité des soins ou des droits des travailleurs.ses de la santé.

L’ONDAM contre la réponse aux besoins

Finalement, l’Objectif National de Dépenses d’Assurance Maladie contraint la réponse aux besoins :

En limitant l’augmentation des dépenses d’assurances maladie alors que celle-ci devrait « naturellement » augmenter pour prendre en compte les nouveaux besoins liés au vieillissement de la population par exemple ; En enfermant le débat politique dans le respect d’une évolution prévue a priori des dépenses de santé ; En produisant une nouvelle manière de gérer le budget du système de santé : A tous les niveaux, du parlement à la plus petite structure de santé, l’objectif est de respecter le budget défini a priori et de contribuer à limiter année après année les dépenses de santé même s’il faut pressurer les travailleurs.ses de la santé et les patients. Les moyens avant les besoins…

 

La CGT, en défendant la remise en cause de l’étatisation de la Sécurité sociale, milite pour une réappropriation du système de santé par les travailleurs.ses. Critiquer l’ONDAM et remettre en cause le principe de la LFSS, c’est participer à la reconquête de la Sécurité sociale et au développement d’une réelle démocratie sociale.

La CGT défend une vision très différente pour la politique de santé en France. Celle-ci doit reposer à la fois sur un financement et une gestion par la Sécurité sociale, elle-même financée par la cotisation sociale. Elle doit aussi reposer sur le développement de centres de santé pluriprofessionnels permettant d’améliorer à la fois l’accès aux soins de toute la population et une reprise de contrôle sur l’offre de soin. C’est notamment en régulant l’exercice libéral de la médecine et la mainmise de l’Etat sur la Sécurité sociale que les travailleurs.ses pourront reprendre le contrôle de celle-ci.

 

 

Repère revendicatif