« Baisse » des exonérations de cotisations ? Un reprofilage des exonérations sans réel changement de politique
En décembre 2023, à la demande de la première ministre Elisabeth Borne , deux économistes, Antoine Bozio (concepteur de la réforme des retraites à points) et Etienne Wasmer, ont été mandatés pour produire une étude portant sur les exonérations de cotisations sociales et leur articulation avec le système socio fiscal et le SMIC.
Leur rapport est paru très récemment recommandant la modification de la structure des exonérations de cotisations sociales, sans réduction globale de celles-ci mais dénonçant une trop faible efficacité de celles-ci à certains niveaux de salaires. En résumé, il conseille de revoir la répartition de ces exonérations pour les redistribuer autrement sans pour autant les supprimer.
Le gouvernement a pris acte de ces propositions en profitant de l’actualité du PLF et du PLFSS pour proposer une légère baisse de ces exonérations de cotisations sociales et une modification de leur répartition. La bonne nouvelle a été de courte durée puisque suite aux pressions du patronat le Ministre de l’économie a annoncé le 4 novembre que le gouvernement souhaitait « atténuer la hausse des cotisations sur les bas salaires » . Du courage mais pas trop donc…
Si le principe d’une baisse est positif pour la CGT, qui défend la suppression intégrale de ces exonérations, la méthode et les objectifs d’une telle modification n’annoncent pas pour autant leur remise en cause à court ou à long terme, d’autant plus si le gouvernement revient sur ses annonces.
Mise en oeuvre :
Le PLFSS 2025, au travers de l’article 6, précise ainsi des modifications en trois temps de la structure des exonérations qui devraient permettre une baisse de l’ordre de 5 milliards par an à partir de 2025 :
- Dès 2024, la prime de partage de la valeur (PPV) versée à compter du 10 octobre 2024 sera intégrée à l’assiette des rémunérations soumises à cotisations sociales. Par ailleurs, malgré la hausse de 2% du SMIC annoncée, le niveau du SMIC au 1er janvier 2024 sera conservé pour le calcul de la base des rémunérations exonérées de cotisations sociales, l’objectif étant de limiter la hausse des exonérations lorsque l’inflation est supérieure à 2% et déclenche automatiquement une revalorisation du SMIC.
- Au 1er janvier 2025 : Les exonérations de cotisations sociales au niveau du SMIC seront baissées de 2 points. Le niveau de sortie des dispositifs d’exonérations de cotisations Assurance maladie (bandeau AM) et allocations familiales (bandeau AF) passera respectivement de 2,5 SMIC à 2,2 SMIC et de 3,5 SMIC à 3,2 SMIC.
- Au 1er janvier 2026 : Les exonérations de cotisations sociales baisseront encore de 2 points et les bandeaux AM et AF seront supprimés et fusionnés avec les « allègement généraux dégressifs » pour ne former qu’un unique dispositif allant d’un peu plus de 35% d’exonérations au niveau du SMIC à 0% au niveau de 3 SMIC, le point de sortie.
Cet article du PLFSS propose donc de fusionner les trois dispositifs existants pour ne former qu’un dispositif d’exonérations générales.
Cette baisse de 5 milliards représente une mesure d’économie pour les finances publiques mais elle devrait cependant permettre aux entreprises qui emploient des salarié⋅es payé⋅es entre 1,2 et 1,6 SMIC de profiter d’importantes augmentations d’exonérations sans aucun effet sur l’emploi démontré.
Aujourd’hui celles-ci représentent plus de 80 milliards pour leur versant général (+10 milliards d’exonérations ciblées).
La CGT continue de défendre la suppression des exonérations de cotisations, qui grèvent les comptes publics en étant presque entièrement compensées par l’État auprès de la Sécurité sociale.
C’est aussi, l’outil d’une prise de contrôle par l’Etat sur la Sécurité sociale, celle-ci étant de moins en moins financée par les cotisations.
La CGT revendique une Sécurité sociale Intégrale (Fiche revendicative n°21) financée par les cotisations sociales et un meilleur partage de la valeur produite par les travailleur⋅ses.