Fiche pouvoir d'achat 9 - Pouvoir d’achat et inflation, quelle évolution dans le temps ?

Publié le 11 mar. 2022
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Après des années de sommeil, l’inflation a ressurgi vivement en 2021, replaçant les questions de pouvoir d’achat au centre du débat public. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, nous avons connu différentes phases d’inflation et d’évolution du pouvoir d’achat, il est intéressant de rappeler brièvement ces périodes.

Comme nous l’avons signalé dans la fiche 2, l’évolution du pouvoir d’achat correspond à la différence d’évolution entre le revenu disponible brut et l’indice du prix de la dépense de consommation finale des ménages. Nous avons ici retenu le pouvoir d’achat par unité de consommation puisque cela nous semble être l’indicateur le plus pertinent.

L’Indice du prix de la dépense de consommation finale des ménages se différencie légèrement de l’Indice des Prix à la Consommation notamment par une prise en compte plus importante du logement.

Jusqu’aux années 1980, un pouvoir d’achat qui augmente malgré l’inflation

De 1960 à 1968, la croissance du pouvoir d’achat est très importante, de 4 à 8% par an. Cela est permis par une forte augmentation du revenu disponible brut et une inflation qui reste limitée, autour de 4%.

Comme le montre ce graphique, entre 1968 et 1985, l’inflation dépassait constamment supérieure à 5% et dépassant même 10% à de nombreuses reprises. Jusque 1979 cela n’empêchait pas d’avoir un pouvoir d’achat par unité de consommation qui augmentait de plus de 2% an.

En effet, l’inflation n’empêche pas la progression du pouvoir d’achat tant que les revenus évoluent plus vite, comme c’était le cas à cette période. Concrètement, si votre salaire augmente en moyenne de 6% par an et les prix de 5%, votre pouvoir d’achat continue à s’améliorer.

Au début des années 80, les revenus continuait d’augmenter fortement mais l’inflation devenait trop importante et venait donc amputer le pouvoir d’achat par unité de consommation.

Années 1990 : la fin de l’inflation… mais aussi de la progression du pouvoir d’achat

Les années 90 sont quant à elles marquées par une forte baisse de l’inflation. Cependant, comme le rythme d’évolution des revenus a lui aussi fortement ralenti, cette baisse de l’inflation ne s’est pas du tout traduite par une accélération de la hausse du pouvoir d’achat par unité de consommation. De fait, la part des profits dans la valeur ajoutée a explosé, quand celle des salaires a diminué.

Pire encore, le pouvoir d’achat par unité de consommation a baissé durant 3 années consécutives, en 2011, 2012 et 2013, pour la première fois dans l’histoire de cette statistique. L’évolution du pouvoir d’achat n’a atteint les 2% qu’une seule fois depuis 2008, mais cette hausse n’est qu’un effet de rattrapage après ces années de baisse puis de quasi-stagnation.

Une stagnation du pouvoir d’achat depuis une dizaine d’années

Ainsi, entre 2010 et 2020, le pouvoir d’achat par unité de consommation n’a augmenté que de 2,3% soit à peine 0,2% d’augmentation par en moyenne. Par comparaison, il avait augmenté de 28,3% entre 1970 et 1980 soit 2,5% par an en moyenne et de 11 % entre 1980 et 1990 soit 1% par an en moyenne. On voit clairement le décrochage progressif de la rémunération du travail.

On voit donc que nous assistons à la fois à une baisse tendancielle de l’inflation mais également à un ralentissement de l’augmentation du revenu disponible brut. La baisse de l’inflation n’a donc pas permis des gains de pouvoir d’achat importants.

Ces dernières années l’inflation avait été reléguée à un sujet de deuxième plan du fait de sa faiblesse structurelle, et la question était plutôt de savoir comment stimuler l’inflation pour qu’elle atteigne les 2% et se maintienne à ce niveau puisque tel est l’objectif de la Banque Centrale Européenne.

Le brusque retour de l’inflation en 2021

L’année 2021 a été très particulière du fait d’un brusque retour à une inflation forte, particulièrement chez nos voisins, estimée à 5% en moyenne dans la zone euro. Cette inflation s’explique en grande partie par l’augmentation des prix de l’énergie, qui sont hors de contrôle des institutions européennes. Cette année a donc rompu avec une certaine atonie de l’inflation depuis la crise de 2008. La question est maintenant de savoir si le réveil de l’inflation va être durable et surtout comment les revenus, particulièrement les salaires, vont évoluer par rapport à cette inflation. Du pur point de vue du maintien du pouvoir d’achat, les hausses de salaire sont une nécessité.

Côté patronal et gouvernemental, on met en garde sur les velléités syndicales de hausse des salaires, en arguant que les hausses de salaire ne feraient qu’augmenter en retour l’inflation. Tout ceci ne tient pas économiquement. Une note éco sur la nécessité d’augmenter les salaires aujourd’hui paraitra très prochainement. Elle expliquera que ce que révèle l’inflation, c’est le conflit entre le capital et le travail et que, plus que jamais, nos revendications sont légitimes. Il est curieux que personne ne se soucie de l’inflation des revenus du capital (et en premier lieu des dividendes).[1] Elle viendra conclure ces « fiches inflation », comme la Note Eco sur la « dette Covid » venait conclure le cycle sur la dette publique.[2]

 

Pour aller plus loin : https://analyses-propositions.cgt.fr/memo-eco-levolution-des-salaires-sur-une-longue-periode

Repère revendicatif