Mémo éco - OUI, les revenus diminuent en France

Publié le 7 sep. 2022
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 Le gouvernement laisse régulièrement entendre que la situation économique du pays serait « meilleure » qu’ailleurs, notamment sur le front du pouvoir d’achat (pour justifier de… ne surtout rien faire). Des propos fermement démentis par les faits.

La hausse de l’inflation se poursuit… jusqu’à quand ?

En juillet 2022 (dernières données disponibles), l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation s’élevait à 6.1% sur un an (6.8% si on retient l’indice harmonisé européen).[1] Rien ne dit que cette hausse ne va pas se prolonger d’ici fin 2022 et au-delà. C’est logiquement le sujet prioritaire du monde du travail, que le gouvernement cherche à minimiser.


[1] La différence entre l’IPC et l’indice harmonisé tient à des manières différentes d’intégrer l’énergie et la santé dans chacun d’eux. Pour plus d’informations, voir ici . Voilà un rappel que la construction d’un indice se fonde sur des conventions, discutables ; le travail de critique de l’IPC, vers un « Indice du Coût de la Vie CGT » continue en ce sens.

Une inflation certes plus faible qu’ailleurs…

C’est effectivement vrai. L’inflation en France est relativement plus faible que pour les autres pays européens quand on regarde les données Eurostat. En juillet 2022 et sur un an, elle dépasse 10% en Espagne et en Belgique, 11% aux Pays-Bas et monte à 8.5% en Allemagne.

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On serait dès lors tentés de crier, comme le gouvernement, victoire ! Moins d’inflation, cela veut dire a priori moins de perte de pouvoir d’achat qu’ailleurs. Ce n’est évidemment pas si simple…

… mais des revenus réels qui chutent plus qu’ailleurs

L’évolution du revenu réel, c’est l’évolution du revenu rapporté à l’inflation ; c’est donc une mesure du pouvoir d’achat. Très simplement, si le revenu sur la fiche de paie augmente de 3% (on parle de revenu nominal) mais que l’inflation est de 6%, le revenu réel a lui diminué de… 3% ! Et c’est bien tout l’enjeu.

Ainsi, selon les données OCDE, les revenus réels ont chuté de 1.9% au premier trimestre 2022, soit une des baisses les plus importantes des pays de l’OCDE.

La cause est très simple ; si l’inflation est plus faible qu’ailleurs, les hausses de salaires (quand elles existent !) le sont tout autant, et sont tellement faibles qu’elles conduisent à une forte baisse du pouvoir d’achat.

Côté privé, tout le monde est concerné

L’évolution du salaire de base est à ce titre éloquente, comme le rappellent les données de la DARES. Il recule fortement du fait de l’inflation (-3% en moyenne tous secteurs confondus), et ce pour toutes les catégories socioprofessionnelles- il baisse respectivement de 2,3 %, 2,7 %, 3,6 % et 3,7 % pour chacune de ces catégories (employé, ouvrier, profession intermédiaire et cadre).

Le réflexe dans les luttes pour les salaires doit donc être de chercher à contraindre systématiquement l’employeur à parler en réel ou en euros constants (c’est-à-dire en prenant en compte l’inflation).

Côté public, une hausse du point d’indice qui masque une chute du pouvoir d’achat

Les services publics connaissent bien la notion de « perte de pouvoir d’achat », avec un point d’indice gelé pendant dix ans. La période 2010-2020 du graphique suivant est à ce titre très parlante.

Ces données disent également deux autres choses, comme le rappelle judicieusement la journaliste de France Info :

  • Sur 36 ans, le point d’indice n’a été supérieur à l’inflation que 9 fois ! Cela veut donc dire concrètement que la stratégie pour diminuer les salaires dans la fonction publique a été de faire varier le point systématiquement sous l’inflation ; c’est une politique d’austérité salariale « à feu doux », que la forte inflation actuelle vient révéler au grand jour.
  • Cela veut dire également que la hausse de 3.5% du point d’indice, annoncée en grandes pompes, masque en réalité une chute d’au moins 2.6% du pouvoir d’achat de celui-ci. Si l’inflation continue sa progression à la hausse, et que le point d’indice ne bouge pas, la perte sera bien sûr plus grande encore.

La stratégie gouvernementale sur le sujet repose, dans le privé comme dans le public, sur des primes, des éléments individuels de rémunération, des repositionnements dans la grille pour certain-es, etc. Tout cela sera insuffisant pour masquer la réalité de ce qui se joue pour l’ensemble des salarié-es. Si gouvernements et employeurs pensent que le monde du travail ne sait pas ce qu’est le revenu réel, c’est qu’ils sont eux-mêmes bien loin des réalités.

 

 

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