Mémo Sécu n°42 : Affection de longue durée : Vers une remise en cause?

Publié le 19 sep. 2025
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 Le régime des Affections Longues Durées (ALD) permettant à de nombreux·ses patient·es une meilleure prise en charge de leurs soins de santé est régulièrement remis en cause par certains responsables politiques.

Sans pour autant que la mesure soit arrêtée, on connait les pistes de travail qui sont envisagées pour sa modification. Qu’il s’agisse des propositions de la CNAM ou de la Cour des comptes, les objectifs sont convergents et s’orientent vers la remise en cause du dispositif pour une part des patient·es qui y accèdent actuellement.

Créé dès 1945 lors de la création de la Sécurité sociale, ce dispositif permet la prise en charge pour les patient·es de thérapeutiques coûteuses ou de soins spécifiques. La remise en cause, même partielle, de ce dispositif entrainerait une augmentation des frais de santé pour ces patient∙es :

  • Une augmentation individuelle des frais liés à la nécessité d’une complémentaire santé qui couvre mieux les soins, du fait du report de charge lié au payement du ticket modérateur ;
  • Une augmentation générale du tarif des complémentaires liée à l’augmentation des risques couverts par le marché des complémentaires ;
  • Une augmentation du reste à charge sur les médicaments lié aux franchises et à la participation forfaitaire dont les plafonds vont doubler.

 Les points importants à retenir

  • Les remboursements de patient·es en ALD représentent 65% des dépenses annuelles d’assurance maladie ;
  • Plus de 13 millions de patient·es sont reconnus en ALD ;
  • Les patient∙es en ALD ont en moyenne 64 ans, la médiane se situant à 68 ans ;
  • La remise en cause de l’ALD pour certaines pathologies, accompagnée d’une   hausse des plafonds de franchises et participation forfaitaire, entrainera une triple augmentation pour les patient·es :
    • Augmentation du prix des complémentaires ;
    • Augmentation du niveau de couverture nécessaire ;
    • Augmentation du reste à charge lié aux franchises et participations diverses.
Qu’est-ce que l’ALD ?

Les ALD sont des affections dont la gravité et/ou le caractère chronique nécessite un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse, et pour lesquelles le ticket modérateur est supprimé lorsqu’elles sont dites exonérantes. Cela signifie que les patient∙es bénéficient d'un remboursement à 100 % sur la base du tarif de la Sécurité sociale de leurs soins de santé liés à l'ALD. Il reste néanmoins à leur charge les franchises, la participation forfaitaire, le forfait hospitalier ou encore le forfait patient urgence (Mémo Sécu n°4).

Ces affections sont regroupées en trois catégories :

L’ALD 30 qui liste l’ensemble des 30 pathologies reconnues en ALD comme la sclérose en plaque, les cancers ou les diabètes de type 1 et 2 par exemple ; L’ALD 31 qui correspond aux ALD dites « hors listes » c’est-à-dire les maladies qui ne sont pas reconnues en ALD 30 mais qui évoluent sur une durée prévisible de plus de 6 mois et dont le traitement est coûteux. 2 critères parmi les 4 suivants sont obligatoires pour une reconnaissance : hospitalisation à venir, actes techniques médicaux répétés, actes biologiques répétés, soins paramédicaux fréquents et réguliers. L’ALD 32 correspond au cumul de plusieurs affections de longue durée entraînant un état pathologique invalidant et nécessitant un traitement. La durée doit être prévisible et supérieure à 6 mois.

 

Selon l’assurance maladie, 13.8 millions de personnes bénéficient du dispositif ALD soit 20,1% de la population. Les bénéficiaires sont en moyenne âgé·es de 64 ans avec un âge médian de 68 ans, 25% des bénéficiaires ayant moins de 54 ans et 25% plus de 78 ans.

Aujourd’hui les dépenses d’ALD représentent environ de 65% des dépenses remboursées d’assurance maladie soit plus de 180 milliards d’euros par an.

Il existe aussi des ALD non exonérantes qui permettent de bénéficier d’un arrêt de travail de plus de 6 mois et de la prise en charge des transports dans certains cas. Elles n’ouvrent pas droit à l’exonération du ticket modérateur.

Une remise en cause possible sous couvert de charge pour le système de santé

Le Premier Ministre avait indiqué suivre les recommandations du rapport Charges et Produits de la CNAM, un rapport annuel produit par les services de l’assurance maladie sur la situation financière de celle-ci. Les pistes sérieuses de modifications semblent être de deux ordres : modifier les critères d’entrée et de sortie du dispositif. Plusieurs modalités sont proposées par la CNAM et la Cour des comptes mais celles-visent toutes à faire sortir une partie des assuré-es du dispositif.

Coté entrée :

La CNAM propose la création d’un nouveau statut dit « risque chronique » avec une « prévention renforcée » qui permettrait d’extraire de l’ALD l’hypertension artérielle, l’obésité, le risque cardiovasculaire, l’hypercholestérolémie ou encore le diabète de type 2 sans comorbidité. Ce statut ne serait donc plus exonéré de ticket modérateur.

La Cour des comptes propose quant à elle de faire la distinction entre 2 nouveaux statuts d’ALD avec des niveaux de prise en charge différents.

Côté sortie :

L’assurance maladie propose d’évaluer régulièrement la consommation de soins des personnes en ALD pour réévaluer l’exonération des personnes en situation de guérison ou de rémission de certaines pathologies.

Quelles que soient les propositions, l’ALD ne couvre aujourd’hui qu’une part des remboursements des personnes ayant droit : la part tenant à leur affection. Pour le reste c’est le droit commun qui s’applique. Les annonces de déremboursement des certains médicaments par l’ALD n’ont donc pas de sens puisque c’est déjà le cas.

D’autant plus que l’on sait aujourd’hui que les patient·es en ALD sont paradoxalement celles et ceux qui ont le plus gros reste à charge en ce qui concerne les franchises et participations forfaitaires, 55 euros en moyenne en 2021 contre 17 euros pour les patient∙es hors ALD.

Enfin, la remise en cause de l’ALD devrait entrainer une augmentation des primes d’assurances complémentaires pour l’ensemble de la population et particulièrement les plus âgé∙es. Une telle remise en cause pourrait donc aboutir à une augmentation générale des dépenses de santé et donc une augmentation des dépenses d’assurances maladie en cas de non-recours aux soins entraînant à son tour une aggravation de la santé d’une part de la population.

 

Repère revendicatif