Comme chaque début d’année, Oxfam a publié ce 17 janvier un rapport sur les inégalités mondiales avec un zoom sur les inégalités en France.
Comme on l’avait déjà anticipé, ce rapport vient confirmer la fracture entre les plus riches et les plus modestes et le véritable séparatisme des riches.
- Les inégalités mondiales explosent
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Le rapport d’Oxfam vient confirmer et objectiver le creusement inédit des inégalités avec la crise sanitaire.
Le séparatisme des ultra-riches
La crise n’a pas été la même pour tout le monde. Non seulement les plus riches n’ont pas été impactés par la crise, mais ils en ont profité! Pour preuve, la fortune des milliardaires a davantage augmenté lors de la crise du Covid qu’en 14 ans avant cette crise.
La première explication de cet enrichissement vient du fait que les plus riches ont été les premiers bénéficiaires de l’argent public sans contrepartie déversé aux entreprises puisqu’ils en sont propriétaires.
Le deuxième élément qui a semble-t-il le plus creusé les inégalités est la politique monétaire. En effet les différentes banques centrales ont créé des centaines de milliards de dollars, euros ou encore livres britanniques afin de financer les entreprises et les emprunts des Etats. Cet argent devait circuler et profiter à l’ensemble de l’économie en théorie; en dehors des achats de dette publique aux Etats, il a en réalité stagné sur les marchés financiers et alimente aujourd’hui des bulles spéculatives qui pourraient provoquer une crise financière lors de leur éclatement, et qui continuent de faire gonfler les patrimoines des plus riches.
Jeff Bezos l’a d’ailleurs rappelé avec une certaine arrogance avant de s’envoler dans l’espace à bord de sa fusée en disant : « Je tiens à remercier chaque employé et chaque client d’Amazon, car vous avez payé pour tout cela ». Les plus riches eux-mêmes savent bien que le travail est l’unique source de la richesse.
L’extrême pauvreté des pays du Sud tue des millions de personnes chaque année
Au-delà de ces inégalités entre les milliardaires et le reste de la population, ce qui tue le plus aujourd’hui ce sont les conditions de vie de milliards de personnes dans les pays les plus pauvres du monde.
Ainsi, le rapport met en avant qu’aujourd’hui encore 5,6 millions de personnes meurent chaque année dans les pays pauvres par manque d’accès aux soins de santé. Le lien entre les milliardaires et cette pauvreté mortelle est réel. Comme le disait Victor Hugo, « c’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches ».
Le dernier exemple en date concerne évidemment les brevets sur les vaccins. Les pouvoirs publics, notamment Emmanuel Macron se font les garants des bénéfices des laboratoires en refusant la levée des brevets qui permettrait une production massive. Le prix à payer pour les bénéfices de ces laboratoires, c’est que des milliards de personnes n’ont pas accès à la moindre dose de vaccin quand « en même temps » certains pays riches en sont déjà à leur 4ème dose. Consciemment, la lutte contre l’épidémie est compromise pour garantir que le métronome du profit continue de battre la mesure.
Autre fait majeur qui démontre la nuisibilité des ultra riches et leur véritable séparatisme ; à eux seuls, 20 milliardaires parmi les plus riches du monde émettent 8 000 fois plus que le milliard de personnes les plus pauvres du monde. Cela ne veut pas dire qu’il “suffirait” de saisir les biens de ces 20 personnes; cela veut dire que la logique économique d’ensemble est caduque et qu’il faut changer radicalement de braquet.
La domination des milliardaires et des gouvernements des pays riches sur ces pays les maintient dans la pauvreté. Oxfam met en avant que de nombreux pays pauvres ont du s’endetter, notamment auprès du FMI, pour faire face à la crise sanitaire. Or, le FMI a, comme il l’a déjà fait, instauré des conditions à ces prêts qui mèneront à l’austérité. Ces pays, aux services publics très peu développés, devront encore faire des coupes dans leurs systèmes d’éducation, de santé au détriment de leur développement.
- La France, triste champion de l’explosion des inégalités
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En matière de « sécession des ultra-riches », la France n’a rien à envier aux autres pays et ce depuis plusieurs années déjà.
Fortune des milliardaires, l’indécence sans limite
Depuis quelques mois, le CAC 40 bat régulièrement son record historique, comme si l’économie française était au sommet de sa forme, alors même que le chômage de masse perdure et que la pauvreté s’est fortement intensifiée pendant la crise.
Comme au niveau mondial, cette euphorie boursière, totalement déconnectée de l’économie réelle, s’explique par les centaines de milliards d’euros déversés par la Banque Centrale Européenne, accaparés par les marchés financiers.
Fort logiquement, puisque la fortune des milliardaires est indexée sur la valeur boursière de leurs titres, ces derniers ont vu leur fortune exploser depuis quelques mois.
Rien que les 5 plus grosses fortunes françaises ont vu leur fortune augmenter de 173 milliards d’euros entre mars 2020 et octobre 2021, soit un bond de 105%. A lui seul, Bernard Arnault a vu sa fortune augmenter de près de 100 milliards d’euros.
En plus de ces fortunes, c’est le pouvoir qui y est associé qui est problématique; sur les salariés bien sûr, sur les médias également. L’exemple le plus frappant étant celui de Bolloré qui a lui seul a pu propulser un chroniqueur d’extrême droite en candidat à la présidentielle rien qu’en “activant” en ce sens l’ensemble des médias qu’il possède. C’est donc à la fois un problème de justice sociale mais également de démocratie, loin d’être anecdotique.
Comme le CAC 40, la pauvreté bat aussi des records…
Dans le même temps, 10% de la population doit recourir à l’aide alimentaire pour se nourrir, selon le Secours Catholique. C’est donc plus de 7 millions de personnes qui sont dépendantes des associations pour se nourrir. En effet, la crise a fortement fragilisé les plus pauvres et ce pour diverses raisons ; chômage partiel, moins d’entraide pendant les confinements, moins de travail informel, contrats non renouvelés, inflation,…
Face à cette détresse de millions de personnes, le gouvernement n’a pas consacré plus d’un milliard d’euros à la lutte contre la pauvreté, sur les 100 déployés à l’occasion du plan de “relance”. Il a pourtant dépensé pas moins de 20 milliards rien que pour la baisse des impôts de production, baisse qui continuera de coûter 10 milliards d’euros par an après la fin du plan de relance.
- Des mesures à prendre urgemment
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Face à ces constats de creusement des inégalités, à la fois au niveau mondial mais également entre les pays, Oxfam propose des recommandations et des orientations qui se recoupent avec certains grands axes revendicatifs de notre organisation.
A l’opposé de la politique fiscale menée durant tout ce quinquennat, il est nécessaire de rétablir une imposition spécifique aux grandes fortunes, de revenir sur les niches fiscales climaticides ou encore de lutter contre l’évasion fiscale des multinationales.
Puisque les services publics sont notre patrimoine commun, il est nécessaire de les renforcer et d’adopter une logique qui s’intéresse d’abord aux besoins et ainsi de rompre avec la logique managériale qui les détruit.
Evidemment, pour que les travailleur-se-s puissent vivre dignement de leur travail, une augmentation générale des salaires est nécessaire. Le gouvernement n’est pas désarmé sur le sujet, il peut en effet décider unilatéralement d’augmenter le Smic pour commencer et d’organiser l’automaticité des revalorisations au niveau des branches.
Enfin, la crise écologique que nous allons devoir affronter nécessite des investissements massifs ainsi que la réduction drastique du niveau de vie des plus riches pour l’élévation du niveau de vie de tous et toutes. Plutôt que des baisses d’impôts sans conditions, l’argent public doit plutôt être mobilisé pour investir dans la rupture environnementale, et ce sans attendre.
En conclusion, le rapport Oxfam apporte comme chaque année des éléments qui viennent conforter la triste réalité d’un monde à deux vitesses, l’intensité du conflit de classe par le monde et la position spécifique de la France, en passe de devenir un paradis pour une minorité et un enfer pour la majorité.