Il y a perte d’autonomie ou handicap lorsque, du fait de limitations de ses capacités motrices, mentales, psychiques ou sensorielles, une personne rencontre des obstacles dans sa vie quotidienne qui compromettent son autonomie en l’absence de compensation.
Face à l’ampleur des besoins liés à la perte d’autonomie, la CGT propose aujourd’hui de repenser la prise en charge de celle-ci en construisant, dès à présent, les bases d’une nouvelle manière de prendre en charge l’aide à l’autonomie en France.
La perte d’autonomie est un fait de société. L’évolution de l’espérance de vie et le vieillissement de la population nous obligent collectivement à repenser les contours de l’aide à l’autonomie. À partir d’une analyse de la situation actuelle, la CGT propose ici de construire un nouvel avenir pour l’aide à l’autonomie grâce à un grand service public de l’aide à l’autonomie.
- La perte d'autonomie en France : les chiffres importants
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L’autonomie en général :
• en 2022, 27,2 % des Français ont plus de 60 ans, soit 18 millions de personnes ;
• en 2022, 7,6 % des plus de 60 ans bénéficient de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et 46 % des 90-94 ans ;
• en 2021, 2750000 personnes souffraient d’au moins une limitation fonctionnelle.
Les seniors :
• en 2022, 27,2 % des Français ont plus de 60 ans, soit 18 millions de personnes ;
• en 2022, 7,6 % des plus de 60 ans bénéficient de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et 46 % des 90-94 ans ;
• en 2021, 2750000 personnes souffraient d’au moins une limitation fonctionnelle. Les seniors:
• en 2021, il y avait 2,5 millions des plus de 60 ans en perte d’autonomie, soit 15 % de cette classe d’âge;
• en 2050, on en prévoit 4 millions, pour une population des plus de 60 ans d’environ 25 millions.
Le handicap :
• en 2018, il y avait 373000 bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap (PCH), un chiffre en forte augmentation;
• en 2018, 1,19 million d’adultes perçoivent l’allocation aux adultes handicapés (AAH), deuxième minimum social après le RSA;
• en 2019, 427000 enfants en situation de handicap étaient scolarisés, une population en besoin d’accompagnement qui ne cesse de grandir (ils étaient environ 126000 en 2004).
Les professionnels :
• en 2021, 1366680 professionnels salariés exerçaient dans le secteur de l’aide à l’autonomie;
• en 2021, 550000 personnes travaillaient dans les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD);
• en 2021, 3,9 millions de personnes apportaient une aide régulière à un senior à domicile.
- L'existant : du domicile aux structures d'hébergement
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Fin 2016, 605000 places d’accueil étaient proposées en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et 7900 en établissements d’hébergement pour personnes âgées (Ehpa) n’ayant pas le statut d’Ehpad. Le nombre de places en Ehpad a augmenté de plus de 2,7 % par an en moyenne depuis 2008.
De plus, en 2020, les résidences autonomie et maisons de retraite répartissaient, à elles deux, plus de 158000 places en accueil de jour et 13500 places en hébergement temporaire.
En 2020, il y avait 505273 places en établissements et services pour accompagner les personnes en situation de handicap qui sont comptabilisées (parmi lesquelles 164517 places pour les enfants et 340754 pour les adultes).
Si l’existant nécessite déjà toute notre attention, les propositions du rapport de Dominique Libault relatives à la prise en charge de l’autonomie grâce au déploiement de services publics territoriaux de l’autonomie (SPTA) nous interpellent tout autant.
Premièrement, la mise en place des SPTA sera directement pilotée par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), via les contrats d’objectif de gestions (COG). La main gestionnaire de l’État apparaît donc clairement ici, par la mainmise d’une caisse clairement étatique.
Deuxièmement, il n’est pas question ici d’un service public, car il n’est pas question d’un service tout court. Sous le grand titre de « service public territorial », le SPTA n’est qu’un simple (simpliste?) et énième plan de coordination et de redécoupage des activités d’acteurs locaux, déjà en difficulté.
Enfin, à l’heure où la parole et l’expérience des acteurs de terrain semblent si cruciales, la mise en place des SPTA occulte totalement les syndicats. Pourtant, ces derniers sont essentiels tant comme représentants des travailleurs que comme experts des réalités professionnelles et du public accompagné.
- Pour un grand service public de l'aide à l'autonomie
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Aujourd’hui, les besoins sont importants et très divers. Pour y répondre, la CGT revendique la création d’un grand service public de l’aide à l’autonomie regroupant et intégrant l’ensemble des structures et des personnels concernés. Le service public serait chargé d’offrir à toutes les personnes en perte d’autonomie un service de proximité, dans les mêmes conditions sur l’ensemble du territoire et à la hauteur des besoins
En établissements comme à domicile, il existe aujourd’hui une multitude de structures avec des statuts et des conventions collectives différentes, ce qui engendre des droits et des rémunérations très différentes pour un même métier. Un service public de l’aide à l’autonomie se doit donc de revenir sur cette disparité, afin de garantir un même niveau de garanties et de salaire pour un même métier.
En termes de ressources, le service public de l’autonomie doit être assuré par la Sécurité sociale via la cotisation sociale. Le financement par l’impôt (CSG, taxes, etc.) doit donc être transformé en financement par la cotisation sociale prise sur le capital. La CGT défend ainsi une autonomie intégralement prise en charge par la Sécurité sociale.
En effet, la CGT revendique une Sécurité sociale unifiée, permettant de prendre en compte toutes les dimensions de la perte d’autonomie sans qu’elles soient réparties entre différentes branches-risques (famille, maladie, vieillesse, et maintenant autonomie). Cela permettrait d’assurer une prise en charge globale des personnes, de l’hébergement aux soins et services spécifiques nécessaires. Autrement dit, il s’agit de répondre enfin à la définition de la santé comme un « état complet de bien-être », tel que défini par l’Organisation mondiale de la santé !
En termes de financement des prestations liées au maintien dans l’autonomie, la CGT défend un financement à 100 % des coûts des structures de prise en charge de la perte de l’autonomie afin de supprimer les restes à charge. Seules les structures publiques ou de Sécurité sociale seraient financées. Ce financement ambitieux permettrait de sortir de la précarité les travailleurs de l’autonomie en revalorisant leurs salaires. Il permettrait également d’assurer des services de qualité, en termes de temps d’intervention par exemple. Ni le secteur marchand et ses profits sur le dos de la santé et l’autonomie, ni le secteur associatif ne peuvent répondre à un tel besoin.
La prise en charge à domicile de la perte d’autonomie doit être elle aussi possible. La Sécurité sociale prendrait en charge le financement des aménagements, proposerait l’intervention des professionnels de santé nécessaire, des dispositifs de maintien du lien social, et des aides forfaitaires pour couvrir les frais fixes inévitablement augmentés et aujourd’hui non pris en compte (nourriture, logement, etc.). Rester au domicile ne doit pas être un luxe mais un droit.
En termes d’organisation du grand service public de l’aide à l’autonomie, la Sécurité sociale, notamment grâce à ses structures territoriales de proximité (caisses primaires et caisses régionales de Sécurité sociale) dispose des compétences et de l’expérience nécessaires pour prendre en charge la perte d’autonomie, aussi bien en gérant directement des établissements qu’en assurant le suivi et l’accueil des bénéficiaires. En gérant des établissements médico-sociaux (Ugecam) ou de santé (centres), l’accueil des assurés (les agences des différentes caisses existantes) ou l’accompagnement des assurés (expériences des commissions d’action sociale des Carsat et CPAM), la Sécurité sociale a fait la preuve de sa capacité à agir. Les outils pour construire le service public de l’aide à l’autonomie sont donc déjà là, au sein de la Sécurité sociale.
Il est temps de les déployer et de revenir sur les attaques néolibérales qui les ont affaiblis !
Enfin, en France, l’observation statistique du handicap et de l’autonomie reste bien insuffisante, insuffisance pointée aussi bien par le Défenseur des droits en juillet 2020 que par l’ONU en janvier 2019. Ces statistiques sont mises à jour en moyenne tous les dix ans. La dernière en date est l’enquête « Autonomie » de 2007-2009, le nouveau volet – en retard – ayant seulement débuté fin janvier 2021.
Le grand service public de l’autonomie doit également répondre à cet enjeu de bonne compréhension des difficultés qui traversent les populations concernées. Les politiques publiques ne peuvent avancer à l’aveugle, le manque de connaissances reste un enjeu dans la bonne délivrance des droits et l’adaptation des offres de services aux besoins réels. Ainsi, le grand service public de l’autonomie se doit d’être également un centre de ressources, d’informations et de réflexions central quant à l’autonomie en France.
- Une reconnaissance professionnelle
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Que ce soit dans le secteur de la santé, le médico-social, en établissement ou à domicile, nous assistons à une crise sans précédent des effectifs tant dans le privé que l’associatif, le public, la territoriale ou encore le particulier employeur.
Les politiques de restrictions budgétaires menées ces dernières années ont conduit à un problème de sous-effectif chronique, entraînant une dégradation des conditions de travail, une politique salariale lamentable et une précarité de plus en plus grande.
La pression sur les personnels, qui s’est accrue avec la crise du Covid-19, conduit de nombreux professionnels à jeter l’éponge, soit parce qu’ils ne peuvent plus effectuer correctement leur travail, soit du fait d’un manque de reconnaissance de leurs compétences.
À cela s’ajoutent les inégalités qui se sont creusées à cause de mesures insuffisantes voire contre-productives, comme le Ségur de la santé dont un grand nombre de salariés ont été exclus, ou encore l’avenant 43, seulement mis en place pour les structures associatives, avec des inégalités de traitement conséquentes pour les deux premières grilles D1E1 et D1E2 au sein même des associations.
- Nos propositions :
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• la création de 200000 emplois dans les Ehpad et de 100000 emplois à domicile, afin de pouvoir répondre aux besoins de la population et améliorer les conditions de travail des personnels ;
• la revalorisation des salaires, a minima à 2000 € bruts sans qualifications spécifiques, ainsi que des grilles salariales réévaluées, tenant compte de ces qualifications ;
• aucune rémunération en dessous du Smic et augmentation des grilles salariales avec l’augmentation du Smic ;
• des évolutions de carrière et des formations qualifiantes, avec une reconnaissance des diplômes par le salaire;
• la fin du temps partiel imposé et de la précarité, avec des recrutements sur des emplois à temps plein et la possibilité de travailler à temps partiel selon le choix des salariés ;
• une organisation du travail respectant des temps de relève et le droit à la déconnexion;
• la prise en compte de la pénibilité, avec un droit au départ anticipé à la retraite (55 ans à taux plein) en plus de la retraite progressive déjà mise en place par certaines structures.
- Pour le domicile
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• la prise en compte dans le temps de travail des temps de trajets dans leur intégralité;
• la revalorisation de l’indemnité kilométrique à 0,60 euro par kilomètre, à défaut de véhicule de service mis à disposition;
• l’arrêt des polyvalences demandées aux salariés ;
• la prise en compte de tous les frais professionnels ;
• la CGT revendique les 32 heures équivalents à un temps plein en prenant en compte : – le temps de trajet ;
– le temps d’intervention auprès des personnes ;
– le temps de transmission et d’échange avec les collègues et le collectif de travail.