Handicap, travail et entreprises : retour sur les revendications

Publié le 7 nov. 2022
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Temps de lecture : 5 min - Crédit photo en Une : ATELIER AU FOND A GAUCHE

Pour cette édition 2022 de la Semaine Européenne pour l'Emploi des Personnes Handicapées, la CGT se propose un état des lieux de l’emploi des travailleur.euse.s handicapé.e.s en France. Plus particulièrement sur un de ses éléments central : l’OETH, ou Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés.

Issue de la loi du 10 juillet 1987, l’OETH porte l’obligation légale pour certaines entreprises d’employer un certain nombre de travailleur.euse handicapé.e, à hauteur d’au moins 6% des effectifs totaux de l’entreprise. Les employeur.euse.s n’atteignant pas le taux minimum d’emploi sont assujeti.e.s à une contribution à l’Association de Gestion des Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées (Agefiph) pour le secteur privé. A noter que le secteur publique est lui aussi soumis à cette obligation d’emploi et que les employeur.euse.s publiques peuvent être assujeti.e.s à une contribution au Fond pour l’Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique (Fiphfp).

Cette loi souffle ses 35 bougies cette année pour un bilan très décevant : en 2021, l’on compte 628 800 travailleur.euse.s handicapé.e.s employé.e.s dans les 107 900 entreprises concernées par l’OETH. Le taux d’emploi direct des travailleur.euse.s handicapé.e.s dans le secteur privé est donc de 3,5%, bien en deçà des 6% attendus depuis 1987.

Rappel législatif

Depuis le 1er janvier 2020 :

L’OETH s’applique aux entreprises et non plus seulement aux établissements de 20 salariés ou plus (comme précédemment). De fait, là où une entreprise divisée en 10 établissements de moins de 20 salariés n’était pas concernée par l’OETH et sa contribution en cas de manquement, les nouvelles règles de calcul prennent en compte la somme des effectifs de chacun des établissements faisant partie de l’entreprise[1].

En 2021 , 107 900 entreprises sont concernées par l’obligation pour 400 000 établissements.

Toujours avant le 1er janvier 2020, le recours à la sous-traitance via des Entreprises Adaptées (EA) ou des Etablissements et Services d’Aide par le Travail (ESAT) permettait de s’acquitter de l’OETH au même titre que l’emploi direct de travailleur.euse.s handicapé.e.s. Depuis 2020, ce recours est pris en compte sous la forme de déduction à l’assujettissement dû, déduction calculé via un taux selon la taille de l’entreprise, la prestation et le taux d’emploi direct de l’entreprise ayant recours à la sous-traitance.

La contribution à l’Agefiph ou à la Fiphfh peut être réduite par un ensemble de dépense que peut faire l’employeur pour l’accueil, le recrutement et le maintien à l’emploi des travailleur.euse.s handicapé.e.s, dépenses déductibles qui ne peuvent excéder 10% de la contribution totale due.

Enfin, l’employeur peut être exonérer de cette contribution via la signature d’accords agréé comportant des mesures envers le recrutement des travailleur.euse.s handicapé.e.s et si le montant de ces mesures est au moins égal au montant de la contribution due. D’une durée de 3 ans et renouvelable une fois, ces accords, selon les configuration et leur niveau (accord d’entreprises, de groupes ou de branches), peuvent être agréés par l’Etat ou la préfecture.

 

[1] https://travail-emploi.gouv.fr/emploi-et-insertion/emploi-et-handicap/article/obligation-d-emploi-des-travailleurs-handicapes-ce-qui-change-en-2020

Les chiffres à retenir
  • L’Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés est d’au minimum 6% des effectifs totaux de l’entreprise. Aujourd’hui, le taux d’emploi direct des travailleur.euse handicapé.e.s représente 3,5% de l’ensemble des effectifs concernés ;
  • 29% des entreprises remplissent intégralement leur obligation par l’emploi direct ;
  • Il y a un lien entre le taux d’emploi direct et la taille de l’entreprise. En 2021, ce taux était d’en moyenne 3,3% pour les entreprises de 20 à 49 salariés, 4,5% pour celles de 250 à 499 et plus de 3,1% pour les entreprises de 2500 salariés et plus ; 
  • Il y a un lien entre le taux d’emploi direct et le secteur d’activité des entreprises. En 2021, le taux s’élève à 2,8% en moyenne dans le secteur de l’information et communication, 5,4% dans l’industrie 5,7% dans l’administration publiques ou encore 3,4% dans le secteur des services aux entreprises ;
  • Fin juin 2022, 8,7% de l’ensemble des demandeur.euse.s d’emploi sont en situation de handicap contre 8,3% en juin 2021 ;
  • Le taux de chômage est de 7,4% pour l’ensemble de la population active au 2ème trimestre 2022, ce taux de chômage est de 14% pour les travailleur.euse.s handicapé.e.s ;
  • Le budget de l’Agefiph est à hauteur de 570 millions d’euros pour 2022, contre 491,3 millions d’euros pour 2021 ;

 

*Source

Revendications CGT : le handicap est un combat syndical !

Par cette obligation d’emploi jamais atteinte et jamais respectée par les employeurs, le handicap est une cause politique qui se joue notamment dans les entreprises. C’est un combat qui, que l’on soit concerné.e ou pas, reste l’affaire de tous, autant par les questions d’accès et de maintien à l’emploi que par celles de la conception d’un travail de qualité, adapté à l’humain (et non l’inverse).

Le vécu des travailleur.euse.s handicapé.e.s peut paraitre comme une épreuve individuelle,  mais la CGT, elle, s’inscrit dans une démarche politique, revendicatrice et surtout collective du handicap.

Il est nécessaire de lier le handicap à toutes les mobilisations (que ce soit la santé au travail, l’égalité homme/femme, la lutte contre le chômage, l’inflation etc.) et surtout dans la lutte des classes. En effet, les logiques économiques et marchandes aliénant le travail sont en causes car empêchant de penser le travail au service de l’humain, qu’il soit handicapé ou non.

La CGT revendique donc la juste place des travailleur.euses handicapé.es dans l’accès à l’emploi, à la vie collective et à la dignité.

Que ce soit en portant l’obligation d’emploi des travailleur.euses handicapé.es en entreprise de 6% à 10%, par l’interdiction des licenciements pour inaptitudes,  par le renforcement du droit à une formation initiale et continue ouverte et accessible et, enfin, par une politique ambitieuse de prévention de l’ensemble des pénibilités au travail et d’une politique de maintien dans l’emploi et de fins de carrière via les retraites anticipées.

Repère revendicatif