Après des dizaines d’heures de négociations infructueuses au cours de la semaine, les ministres de l’économie de la zone euro ont réussi à se mettre d’accord sur une nouvelle réponse à la crise. Bruno Le Maire s’est de suite félicité de cet « excellent accord » à 500 milliards d’euros qui « marque un jour important pour l’Union Européenne ». Pourtant en y regardant de plus près, de nombreuses réserves doivent être soulevées.
- Retour au mécanisme européen de stabilité (MES)
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La partie la plus importante de ce plan porte sur des prêts aux États à hauteur de 240 milliards d’euros grâce au dispositif du mécanisme européen de stabilité, outil garant de la rigueur budgétaire.
Il s’agit d’un fonds abondé par les États et dont les prêts peuvent aller jusqu’à 2% du PIB maximum, soit environ 50 milliards d’euros pour la France.
L’avantage de ces prêts et qu’ils permettent d’abaisser les taux d’intérêts pour les pays en difficulté, cependant ils sont soumis à la condition de faire régner l’austérité ensuite. C’est un moyen de pression pour les institutions européennes de rappeler aux États leurs obligations budgétaires.
Un autre volet de l’accord est un fonds de garantie de la Banque Européenne d’Investissement pour des prêts aux entreprises allant jusqu’à 200 milliards. Rien de très innovant non plus ici, ce n’est qu’une extension d’instruments déjà mis en place dans de nombreux pays, notamment en France.
Enfin, 100 milliards doivent être levés par la Commission Européenne pour aider les États à financer les dispositifs de chômage partiel. Concrètement on sait peu de choses sur ces financements, notamment sur les conditions de remboursement.
- « On est d’accord sur le fait qu’il faut se mettre d’accord »
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L’une des raisons de satisfaction du Ministre de l’Économie Bruno Le Maire est notamment sur l’éventuelle création d’un fonds de relance européen qui pourrait être doté de 500 milliards d’euros selon lui. Mais rien n’a été concrètement décidé sur ce point, les ministres n’ont pas le pouvoir pour cela et les points sensibles n’ont même pas été évoqués. Ils ont simplement obtenu que cela soit discuté entre les chefs d’États dans des réunions à venir. Ils se sont donc mis d’accord sur le fait qu’il fallait trouver un accord. Ni plus, ni moins. Il faut un début à tout diront les optimistes.
- Les pistes plus progressistes éludées
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Des instruments plus innovants et plus solidaires étaient en discussions et attendus par beaucoup de pays en difficulté. La question de la mutualisation des emprunts était une cause défendue par la France, l’Espagne ou encore l’Italie, très en difficulté.
Cela consiste à ce que les emprunts soient émis au nom de tous les pays de la zone Euro plutôt que pays par pays. Ainsi, les États en difficulté comme l’Espagne ou l’Italie bénéficient de la garantie de pays plus solides comme l’Allemagne ou les Pays-Bas afin d’avoir un taux d’intérêt plus faible. Bien que cela ne soit pas la panacée, cela aurait permis à ces pays d’alléger leur effort budgétaire et aurait été une marque de solidarité entre pays européens.
Enfin, le financement direct des États par la Banque Centrale Européenne (pour ne pas passer par les marchés financiers) comme va le faire l’Angleterre n’a pas été évoqué. Pas plus que la question de la monétisation de la dette, c’est-à-dire que la Banque Centrale Européenne prêterait aux États mais sans exiger de remboursement. Cela permettrait de ne pas augmenter la dette publique pour ne pas avoir à porter ce fardeau pendant des années, fardeau qui servira de justification aux politiques libérales de réduction des dépenses publiques.
Une fois de plus, la réponse européenne s’inscrit dans la continuité de la logique libérale et austéritaire. Chaque euro de dépense publique consenti aujourd’hui fera l’objet de sacrifices demain, telle est la doctrine européenne. Plutôt que l’autosatisfaction des ministres actuels comme Bruno Le Maire, fions nous plutôt à la méfiance affichée par l’ancien ministre grec Yanis Varoufakis, qui a déjà fait les frais de cette doxa libérale.
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